Association Aurore

L’hébergement d’urgence pérennisé

15 juillet 2021

© Association Aurore


L’association Aurore est un acteur historique de l’accueil des personnes en situation précaire. Elle a logé plus de 600 personnes vulnérables lors de l’occupation temporaire des Grands Voisins, dont elle était un des fondateurs et copilote avec Yes We Camp et Plateau Urbain. L’avenir de cette activité d’hébergement est désormais assuré de manière pérenne dans le futur quartier.

Entretien avec William Dufourcq, directeur d’activité au sein de l’association Aurore

Aurore gérera dans le futur quartier un Centre d’Hébergement d’Urgence (CHU) et une maison relais. Quelle est la genèse de ce projet ? Il prolonge l’occupation temporaire. Six centres d’hébergement d’urgence avaient été créés dans l’ancien hôpital, démontrant un réel besoin. La nécessité de pérenniser cette fonction d’accueil avait été évoquée dès lors à plusieurs reprises par les mairies du 14e arrondissement et de Paris, l’aménageur et les bailleurs. De son côté, Aurore avait manifesté très tôt son intérêt pour une implantation permanente d’un centre d’hébergement d’urgence dans le futur quartier. D’où la décision de créer et confier à Aurore un CHU de 90 places et une maison relais de 26 logements. Tous deux se situeront dans le bâtiment Chaufferie, réalisé par la bailleur social Paris habitat. C’est toute la richesse des occupations temporaires ! Elles inspirent et préfigurent la programmation définitive des sites investis.

Projet Saint-Vincent-de-Paul / Bâtiment Chaufferie
Le bâtiment Chaufferie à Saint-Vincent-de-Paul © Bourbouse & Graindorge - Sergison Bates architectes


Qu’est-ce qu’un CHU ? Et une maison relais ?
Un CHU est un centre d’hébergement collectif et d’accompagnement social. Il constitue le dernier filet de sécurité pour les sans-abris. Ils y sont logés, nourris et pris en charge 24 heures sur 24, pour une durée de moins d’un an à quelques années. L’accompagnement social vise à les remettre dans le circuit de la vie : retrouver une certaine autonomie, retrouver un emploi, accompagner l’ouverture des droits… Une maison relais regroupe, elle, une vingtaine de logements indépendants : des petits studios avec cuisine destinés à des personnes suffisamment autonomes pour s’occuper d’elles-mêmes. Le soutien social y est moins important que pour les CHU, se résumant à la présence d’un maître de maison et d’un travailleur social. Celui-ci accompagne les bénéficiaires vers la sortie de la précarité, vers le logement social…


Accueil de jour pour demandeur d'asile et réfugiés, quai d'Austerlitz, Paris 13 © Association Aurore


Comment le CHU et la maison relais s’intègreront-ils dans le quartier ?
En accord avec Paris Habitat, une buanderie mutualisée verra le jour, dans l’îlot Chaufferie, au rez-de-chaussée du bâtiment A, qui accueille aux étages le CHU et la maison relais. Dans ce local, ouvert à tous, les personnes hébergées géreront un point de vente de thé, café… créant un espace de rencontre. Cette logique de « décloisonnement du social » fait écho à l’esprit des Grands Voisins. Le contact avec l’autre est d’autant plus précieux pour sortir de l’isolement que les ressources du travail social s’amenuisent. De nouveaux leviers – solidarité locale, interaction avec le public – doivent être activés. Dans cette optique, Saint-Vincent-de-Paul bénéficie d’une localisation idéale, au cœur du 14e arrondissement. Nos lieux d’accueil et d’hébergement d’urgence sont généralement éloignés des centres-villes, dans des zones précarisées, dans les quartiers de la politique de la ville et il est vital de replacer cette fonction solidaire au cœur des villes…

Comment favoriser le contact entre les personnes hébergées et le public ? C’est tout le travail des équipes sociales : créer des partenariats institutionnels, sensibiliser le public, susciter localement les envies de générosité… Différentes initiatives peuvent être organisées : potagers partagés, ateliers bricolage ou de réparation de vélos, cafétéria mobile… Par ailleurs, grâce au Dispositif Premières Heures (DPH), qui subventionne l’emploi des profils les plus marginalisés, certaines personnes hébergées sont salariées au sein des équipes d’entretien de la voirie et des espaces verts, ou bien elles peuvent être employées par des artisans travaillant sur site. La gestion des socles actifs du futur quartier par un opérateur unique devrait aussi faciliter les partenariats entre le futur CHU et les commerces et entreprises de Saint-Vincent-de-Paul. C’est, là aussi, une manière de prolonger l’esprit des Grands Voisins.


Les Cinq Toits, Paris 16 © Les Cinq Toits / Association Aurore


Dans quelle stratégie d’Aurore le futur CHU s’inscrit-il ? La majorité de nos implantations sont pérennes et le futur CHU de Saint-Vincent-de-Paul répond à un enjeu essentiel de développement de ce type de structures. Elles seront de plus en plus utiles à l’avenir car les besoins augmentent. Cela-dit, le temporaire revêt un intérêt considérable, car l’accès au foncier est très coûteux à Paris, notamment pour les activités sociales. Il offre donc des possibilités de mises à l’abri complémentaires, rapides et à coûts maîtrisés. Les Grands Voisins ont représenté dans ce contexte une opportunité unique. Après leur fermeture, de nouveaux sites et centres d’hébergement ont pris heureusement leur relais dans Paris, grâce à des partenariats avec la Ville, les bailleurs, d’autres acteurs associatifs…  Par ailleurs, l’Association Aurore cherche à essaimer l’expérience des Grands Voisins en créant de nouveaux centres d’hébergement d’urgence alliant accueil social et ouverture au public.

Quels sont ces sites ? Avec « Les Cinq toits », dans le 16e arrondissement, Aurore a créé depuis deux ans, dans l’ancienne caserne Exelmans, 350 places d’hébergement, un pôle vélo, des ateliers partagés et un restaurant. Le site des Cinq Toits a bénéficié du soutien de Plateau Urbain et de Yes We Camp, les mêmes partenaires qu’aux Grands Voisins. Dans le 14e arrondissement, près du parc Montsouris, le village Reille ouvert début 2021 avec Plateau Urbain accueille un centre d’hébergement d’urgence pour jeunes précarisées, opéré par Aurore, et une colocation solidaire confiée à l’association Caracol. Un site d’occupation temporaire, créé dans le 8e arrondissement par Plateau urbain, associe, lui, un CHU réservé aux femmes précarisées et des lieux d’accueil d’artistes et d’artisans. Enfin, le Port Autonome de Paris a mis à disposition d’Aurore quelques pavillons à côté de la Cité de la mode. C’est ici qu’a été relocalisé, à côté d’espaces dédiés à la restauration, l’accueil de jour pour les primo arrivants, réfugiés et Demandeurs d’Asile situé auparavant aux Grands Voisins.


Le Village Reille, Paris 14 © Anne Leroy - Plateau Urbain


Les Cinq Toits, Paris 16 © Yes We Camp

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